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21 juillet 2014

37 ans: Âge de marde.

J’ai maintenant 37 ans. Hé oui! Ça vous troue le cul, hein? Mais non, je blague, je sais bien que ça vous fait rien pantoute. Pas plus qu’à moi d’ailleurs. Ni chaud, ni froid. Aucun changement. Pas un pli s’a poche comme on dit. Non mais, 37 ans… quel maudit âge plate. J’ai beau me poser la question, j’ai absolument aucune osti d’idée de ce qu’un 37e anniversaire peut apporter dans une vie.

Non mais, il se passes-tu rien pantoute à 37 ans, hein? Tsé « rien » comme dans « rien ».  C’est l’insignifiance totale. Si y’a bien un âge qui n’est pas une étape de la vie en soi, c’est 37 ans. Tsé, c’est comme juste un peu plus que 35, tout en étant pas trop loin du 40, deux âges déjà pas super valorisants. Y’a comme aucun criss de moyen de voir ça d’un œil vraiment positif. Même en forçant un peu la note… Attendez… Ça me vient presque… Ben non, criss… 37 ans, c’est vraiment un âge de marde.

Y’a personne de « hot » qui est mort à 37 ans. Aucune rockstar en tout cas. Personne sauf peut-être Joseph-François-Édouard de Corsembleu, un dramaturge français dont on se criss tout autant. Y’a personne non plus qui a révolutionné le monde à 37 ans. On ne fête aucun événement historique dans le monde qui aurait eu 37 ans. J’ai beau m’imaginer, y’a rien qui me laisse plus pantois que de dire que j’ai 37 ans. Juste d’utiliser le mot « pantois » à 37 ans me donne la nausée. Même que j’vais vous dire : J’ai passé les douanes US récemment, et quand le douanier m’a demandé « nothing to declare? », je crois que si j’avais osé lui répondre « oui, j’ai 37 ans », il m’aurait assurément répondu « I don’t give a fucking shit, but have a nice trip… ».

Et quel âge ingrat hein? Le tour de taille qui s’installe pour de bon, les poils de barbe qui blanchissent, la poche qui s’étire tranquillement…  Quand  j’lève une boîte un peu lourde, deux jours après, les épaules m’élancent. Pis quand j’me penche, j’fais des bruits de bouche…. Criss...

Y’a jamais personne dans ta vie qui va te dire : « De quoi rêves-tu pour tes 37 ans? »… Parce que tout le monde s’en câlisse que t’ai 37 ans, s’est sûr. Tout le monde sauf peut-être un autre gars de 37 ans qui se cherche des idées. Pis c’est simple, c’est parce que depuis qu’on est petits, y’a jamais personne qui nous a parlé de ce qu’on pouvait rêver d’être à 37 ans. Pis tsé, moi j’ai aucun osti de planning de prévu pour ça… 50 ans peut-être,  65 au pire, mais criss, pas 37. L’année risque d’être longue…

Vous allez me dire que j’ai tout ce qu’il faut pour être heureux. Une bonne job, une maison, une auto, une piscine, un air climatisé central (oui, je sais, ça va au mérite)... Une blonde que j’aime, des enfants en santé, d’la famille, des amis… Oui, oui... Oui, mais tout ça je l’avais aussi déjà aussi à 36!!! Y’a rien de neuf là-dedans! Quand j’me suis réveillé à mon premier matin du 37, c’était pareil qu’à mon premier matin du 36, sauf la poche un quart de pouce plus basse…  Bonne fête mon champion!

Si vous demandez à Google « quoi faire à 37 ans », il vous répondra en se questionnant si c’est trop vieux pour avoir des enfants, pour retourner à l’école, ou pour perdre sa virginité. Palpitant en tabarnack! Pis c’est ben la première fois que je ne tombe même pas sur des photos de totons en faisant une recherche pas rapport… La seule chose que j’ai trouvé, c’est un site où on vend des petits carnets vierges intitulés « Les trucs à faire l’année de mes 37 ans ». (http://karibook.fr/carnets-minilist/300-les-trucs-a-faire-l-annee-de-mes-37-ans.html )Des carnets VIERGES, osti de criss! Hé misère…

Sur ce, j’vais aller me faire une p’tite tisane. Oui, une tisane câlisse, parce que je tolère plus la caféine. Pis j’pense que je vais même me payer deux gros  Fudgee-O double crème. Après tout, c’est pas tous les jours qu’on a 37 ans.



2 juin 2014

Retour aux Souches: mon récit.

Dernier vendredi de mai, milieu de l’après-midi, sur la 15. Les fenêtres baissées, la musique dans le tapis.

Deux Chevaliers du Houblon sont en direction nord. Le nord, le vrai : le nord de Sainte-Agathe-des-Monts.
Le nom de code de l’opération : « Retour aux Souches ». L’objectif de la mission : retrouver le « moi » en nous, avec d’autres nous.

Un premier arrêt s’impose, sur la Principale de Sainte-Agathe, pour vérifier l’état des lignes de fut d’un p’tit resto-bar et pour se faire un p’tit fond. Le soleil est au rendez-vous, et nous confirme d’avance sa présence pour les 48 prochaines heures. On jette un dernier coup d’œil à nos cellulaire et au monde virtuel, car dans quelques minutes ça ne sera plus possible. Deux pintes de Rickard’s White et une assiette de nachos semi-mou plus tard, on retrouve notre monture.

Le chemin qui nous sépare de notre destination finale se fait rapidement. On quitte bientôt l’autoroute, on amorce la sinueuse 329.

-C’t’icitte à gauche.
-Hé que j’ai ben hâte de voir dans quoi tu nous as encore embarqués…

L’asphalte devient vite gravelle, le chemin se tort de plus en plus, les maisons se font rares, la lumière aussi. Monte descends, tourne tourne.
-Garde ta gauche à la fourche
-Té sûr?
-Ben oui!
-Criss c’est ben creux!
-C’est supposé être à droite au boutte…

Comme de fait, au bout, on nous accueille avec des grands signes de bras. Pas vraiment le choix d’aller à droite ça l’air. Rapidement, le P’tit Bonheur se dresse majestueusement devant nous; pas de doute, nous sommes à destination.
-On se park où? »
-J’sais-tu, moé? »
-Y’a un parking en haut, un autre en bas.
-On a deux glacières remplies de boisson, moi j’dis qu’on va en bas!

Une fois stationnés, on se délie les jambes, on prend une première bouffée d’air frais, en regardant la plage et la structure de bois qui servira bientôt au feu de camp, qui nous attend impatiemment. On se dirige donc vers l’entrée présumée de l’auberge, un peu incertains. Y’a pas grand monde, il est encore tôt faut croire. On ouvre les portes, on entre et vlan! Droit devant nous, y’a un loup de 6pieds dans le portique, une madame avec un gros kodak, pis deux bols à punch.
- Bon ben, j’pense que c’est icitte!

Premier bonsoir bien cordial du personnel, et sans tarder on nous fait signer une décharge.
- Ouain, ça promet!

S’en suivent quelques explications d’la seconde dame bien gentille, qui réquisitionne nos appareils électroniques illicites, nous remet nos clés ainsi que quelques détails. On retourne ensuite à la voiture, et un premier transport de bagages s’en suit. Un voyage de paresseux évidemment, les bras vraiment trop pleins, et on s’enfonce dans les couloirs. La première partie est bien droite, ça va bien. Ensuite, oh-pe-laye. Les couloirs rétrécissent à vue d’œil, ça vire de tous les bords, monte, descend, tourne icitte, tourne par là…un vrai labyrinthe.
-Coudonc, c’tu moé où les murs se rapprochent de plus en plus?
-Aweye avance, j’ai soiiiffff…

Juste avant d’arriver à la dernière porte d’urgence tout au fond du labyrinthe, avec un « stop » écrit dessus, on trouve la nôtre. Les sacs ne passent pas de travers, mais tournés ça entre. Un magnifique oasis nous accueille: deux lits simples pas d’couvarte, pis un évier. Bucolique, mais ça fera l’affaire. On dépose nos sacs, on barre la porte, et on vire de bord pour aller chercher le plus important : les glacières. On retourne dans le couloir, tourne à droite, tourne à gauche et woh!
-Ben voyons donc, c’tu moé ou on vient de passer là, pis y’avait pas de mur tantôt!

Visiblement un employé est allé au grenier juste après notre passage, dont la trappe se dressait encore fièrement devant nous, nous bloquant donc le corridor. Le temps qu’on comprenne qu’on n’est pas fou (délai dû aux deux pintes de bières),on se faufile entre la trappe et le mur, et on retrouve notre chemin vers l’extérieur. On revient ensuite à la réception avec nos deux glacières. Le loup nous dévisage de ses yeux vides, découragé de voir qu’on a autant sinon plus de boisson que de bagages. De retour à la chambre, on dépose le tout, et c’est le moment de vérité; pchishhhht! On ouvre la première bière officielle, et on se fait un toast. Ça y est, on décroche déjà.

On redescend en bas, à l’arrière de l’auberge, rejoindre quelques autres crinqués comme nous qui arrivent presque trop tôt. On fait la connaissance de Michel dit « Iron Man », Rudy le vaillant, Johanne avec sa machine à bibittes, et Collin le traitre.
Plusieurs autres arrivent rapidement, on se présente, on socialise un peu, et on nous appelle bientôt au Petit Salon pour l’accueil officiel.

C’est là qu’on fait la connaissance de Humus, le chef spirituel, accompagné du grand Fanal, son acolyte Lanaf, la belle Haddock, le millionnaire et son épouse. Ils seront nos guides et notre source d’énergie tout au long du week-end, et on les sent aussi énervés que nous. On nous explique les règlements, le déroulement de la première soirée. C’est à ce moment que Collin le traitre se fait prendre en flagrant délit de possession de matériel électronique illicite, et est aussitôt escorté par Fanal et Lanaf vers le donjon. Coup de théâtre! Dans le temps de le dire, ils réapparaissent d’une autre porte, et Collin est devenu Empereur. C’était donc un subterfuge pour nous espionner, simple civils, pour voir si quelqu’un parmi nous pensait tricher. Le message est clair, on sera surveillés! Mais tous passent le test avec brio.

On s’inscrit ensuite pour l’aventure avec des jeux pour le lendemain, qu’on comprend plus ou moins, et on se dirige dehors pour l’allumage du premier feu du week-end. 70 péquenots autour d’un tas de bois enflammé qui fraternisent, boivent, se détendent, et se réchauffe autant du dehors que du dedans.

Ensuite un Conteur un peu louche de la plus pure tradition, tout droit sorti d’une pub de pastilles Riccola, vient nous entretenir sur son passé, sa mère, et autant d’histoires qu’on a bien de la difficulté à suivre du haut de nos quelques verres. Ensuite les guitares prennent le relais, les refrains sont entamés. Les dernières lueurs du jour disparaissent au bout du lac, derrière la montagne, et les étoiles s’allument une à une. Bientôt c’est tout le ciel qui nous éclaire comme un immense filet de lanternes chinoises. Le lac se fige, tout comme le temps.

Dans les prochaines heures le groupe évolue, se disperse petit à petit, et seuls quelques vaillants guerriers bien réchauffés veillent au feu, se racontant leur petit vie, ou celle qu’ils rêvent d’avoir. Sur le quai tout près, on philosophe profondément;
-Ça va être rough l’hébertisme demain!
-Ben non, on va être top shape. J’te gage même que j’te bats.
-Pfff? Si j’te bats, tu me dois une bouteille de Masi,
-Du Masi!? C’est d’la piquette. On parle pas d’un Veuve Cliquot là, tsé, t’es sûr?
-Ben non, c’est bon du Masi.
-Ah ok…

Une seule chose est certaine, il n’y a aucun autre endroit au monde où nous souhaiterions être, là, à ce moment précis, dont on se souviendra longtemps.

À cet instant, on sait déjà qu’on a fait le bon choix, que cette petite aventure influencera nos vies. Le « moi » en nous refait déjà surface, se ralliant à celui des autres, et l’essentiel redevient tout à fait clair à nos yeux. Le Retour au Souches opère déjà sa magie…


Les dernières braisent s’éteignent, et s’achève ainsi la première soirée d’un week-end qui sera tout aussi mémorable.

3 janvier 2014

Emmène-nous patiner

Quand j’étais petit, je n’étais pas grand (désolé, je ne pouvais m’empêcher de la faire…).

Je disais donc plutôt : Quand j’étais petit, j’adorais patiner. On avait la chance d’avoir un parc juste en face de la maison, et on y retrouvait l’hiver une grande glace pour le hockey, avec les bandes, les filets et tout le kit, plus un petit sentier raboteux qui faisait le tour du parc. Évidemment, on patinait presque tous les jours. C’était tellement accessible qu’on mettait même nos patins dans la maison, on déboulait l’escalier (du 2e étage), on traversait la rue en faisant des flammèches, et on embarquait sur la patinoire. On y passait de longues heures, et j’étais donc rendu quand même assez habile et solide sur mes lames. Aujourd’hui, maintenant père de famille, j’y vais avec les enfants de temps à autres. Disons que le patinage a perdu un peu de son charme. Voici mon histoire.

Pendant les fêtes, une bonne journée on décide d’aller patiner. Mon fils en avait fait à la campagne avec ses cousins la veille, et il avait retrouvé la « flamme de la lame». On sort donc le stock, on s’habille et je pars seul avec les deux mioches. Déjà dans l’auto, on a trop chaud. On n’a pas le choix de bien s’habiller, car dehors on gèle solide, mais dans l’auto on frôle le mal de cœur. Heureusement on n’a pas loin à faire. Après avoir habillement dérapé sur 3-4 stops avec le char, on se stationne au parc du quartier, et on se dirige vers la cabane. La fameuse cabane…

Le seul fait d’entrer là-dedans évoque en moi plein de souvenirs. Premièrement la porte trop lourde pour rien est pas aussitôt fermée que tu te mets à transpirer tellement il fait chaud. Mais pas « chaud » du genre « ah on est bien en dedans ». Non plus « ahh, c’est confortable », non; il fait chaud en tabarnak. Le chauffage est tellement dans le tapis que tu serais bien en bobettes, genre. Les murs suintes pis comme y’a aucune fenêtre pis que c’est mal éclairé, ça l’air d’un sauna. Un peu étourdi, poussé par le vent chaud du ventilateur, t’enjambes les bâtons de hockey que personne prend le temps d’accoter au mur, et tu déposes tes douze sac à dos près d’un bout de banc où y’a pas de bottes en-dessous, si t’es chanceux. Oui, douze sacs, parce que maintenant les enfants patinent avec des casques. Quand j’étais petit, on y allait à la mode « commando », ça prenait moins de place. Maintenant chacun a son sac, avec ses patins, ses protèges lames, son casque et sa guenille, plus une tuque pas de pompon qui peut entrer sous le casque. Plus 1 hockey pis 3 rondelles pour s’amuser. Viens ensuite la merveilleuse étape du laçage.

Tu t’installes donc devant tes enfants, un genou par terre dans la neige fondue, le souffle coupé parce que ta bedaine de bière est comprimée en dessous de tes deux couches de pantalons, et tu commences à préparer le premier patin. Étrangement, à chaque fois, les criss de patins semblent plus petits que la dernière fois, même si c’était la veille. Hier le pied a bien sorti, mais là, il n’entre plus du tout. T’es obligé de délacer l’osti de patin au grand complet pour faire passer la cheville molle de ton morveux qui pousse pas. Pis là quand tu le relaces, évidemment le cordon qui fait quand même à peu près douze pieds, a quand même trouvé le moyen de sortir des deux premiers osti d’œillets, pis t’es pas capable de le rentrer parce que le p’tit criss de plastique sur le bout y’é pété et donc le lacet est tout effiloché. T’essaye de le rouler du bout des doigts, en vain. Tu penses même pendant 2 secondes à le mouiller avec ta bouche, pour que ça roule mieux, mais l’odeur de calcium pis de caoutchouc chauffé te lève déjà le cœur. Évidemment, c’est pas long que les enfants commencent à se plaindre qu’il fait chaud, ajoutant un peu d’huile sur le feu de ta patience.

Pendant tout ce temps où tu continues de transpirer, y’a des étranges qui te regardent. Ça c’est l’autre affaire qui était pareil dans mon temps. Y’a tout le temps des ostis de bizarres dans ces cabanes là, hein? Soit tu pognes des enfants pauvres et sales qui portent clairement la tuque que leur père leur a laissé en héritage, soit 2-3 ados crasseux qui se sont roulé un p’tit joint en arrière d’la cabane, soit des douchebags qui s’appellent tous « big », ou bien des p’tits vieux seuls et un peu louches.

Une fois tout le monde péniblement chaussé, on s’enligne vers la porte. Pis là, avant même que t’ai le temps de dire quoi que ce soit, au ralenti comme dans un film, tes enfants sont penchés sur la fontaine pas propre pour boire une bonne gorgée d’eau jaune et tiède avant de sortir… Eurk.

Prochain défi : apporter la plus jeune, qui se tient à peine debout, jusqu’à la patinoire. Souvent je reste en bottes à cause de ça, mais là le plus vieux insistait pour que je chausse mes patins. J’essais donc d’avancer sur la glace raboteuse, tenant ma fille molle et sans aucun équilibre d’une main, le dos en train de barrer à force d’être croche. Tout qu’une aventure, mais on y arrive sans que ça saigne trop. 

Enfin arrivés sur la patinoire, on fait quelques tours, transis de froid. Oui parce qu’en dessous de notre manteau on est maintenant tous mouillés, tellement on a eu chaud. Après avoir donné une bonne swingue à la fille, j’essais de faire quelques moves de patin, mais je sens que mes chevilles n’ont plus aucun support. Je ne me sens pas trop en confiance quand je tourne, pis j’ai l’impression que si je brake trop sec, elles vont péter.

Comme je commence à peine à me réchauffer, ma fille me lâche un regard. Ce regard de petit chien mouillé qui me fait dire que j’suis déjà sur le bord en criss de retourner me faire du gros fun dans la cabane. Elle a froid, pis elle est tannée de tomber. J’essais donc de convaincre le plus vieux qu’on va bientôt s’en aller, lui qui semble si heureux. J’fais donc attendre un peu la petite pour être « fair », et après avoir fait disparaître tout sourire du visage du plus vieux, on se réenligne en famille sur la cabane en plywood. Pis à on r’commence tout, mais à l’envers, en commençant par la gorgée d’eau tiède…


Après avoir finalement passé plus de temps dans la cabane que sur la patinoire, je retourne donc à la maison le dos en compote, les chevilles barrées, avec mes enfants qui ont trop chaud, vraiment faim et qui sont fatigués. Pur bonheur d’hiver.