Sur le divan
en ce dimanche soir, tout en dégustant mon bourbon on-the-rocks et un mignon restant
de chocolatine qui me désirait, j’écoutais à la télé une toune de Charlebois, « Ordinaire »,
et ça m’a fait penser spontanément au magasin L’Équipeur. Quel criss de rapport
me direz-vous, du haut d’une interjection bien spontanée! Et bien soit, je vous explique.
J’suis allé
récemment chez l’Équipeur, magasin de vêtements pour hommes et gouines, et j’ai
eu un genre de révélation. Celle que j’étais un gars des plus ordinaires. Pas
que j’le savais pas déjà, parce qu’il faut bien se l’avouer, j’ai déjà eu un
minivan et une tente-roulotte, mais c’était plutôt comme une sorte de confirmation.
J’m’étais
stationné drette devant la boutique, comme d’habitude, parce que j’suis jamais
bien loin de la porte. Trois ou quatre chars devant le magasin chaque fois, c’est
pas mal la norme. Si t’arrives là pis que y’a dix chars proche d’la porte, grouille
toi à rentrer parce que y’a un maudit gros spécial sur les Kamik pis y donnent
des beignes en rentrant, ça va être excitant!
Dès que tu
rentres à l’intérieur (question de placer un pléonasme bien inutilement), tu le
sais tout de suite que t’es pas du tout dans une boutique branchée. Chez Simmon’s
ou autres boutiques de linge encore plus huppé pour jeune homme moderne, y’a d’la
mademoiselle bien garnie au pied carré; tellement que des fois tu te souviens
même plus ce que t’es venus chercher. Chez L’équipeur, c’est pas du tout un
problème. Les madames à la caisse qui se pitchent pour te dire un « bonjour »
trop intense quand tu rentres, décolleté ou pas, sont pas là pour faire mousser
les ventes. C’est pas comme qu’on dirait une « valeur ajoutée ». Elles
ont une tâche bien spécifique, c’est d’accueillir l’homme moyen et de scanner
des étiquettes, pis c’est toute. C’est pas là que tu fais les yeux doux pis que
tu demandes un extra, tsé...
Même la
disposition de l’allée principale est simple : un rond, criss. Tu peux pas
te perdre, là. Tu pars d’un bord, tu continus, tu continus, pis à la fin, ben
osti t’arrives à la caisse, juste à côté d’où t’étais partis. Mais à quelque
part, j’haïs pas ça; j’sais exactement le nombre de pas qu’il y a entre la
porte pis mon rack de jeans, ce qui est très sécurisant.
Oui parce
que la raison principale qui me pousse à aller là, à part Monique à la caisse
2, c’est que c’est la seule maudite place où ils vendent des jeans qui me font.
Parce qu’ils ont des longueurs de jambes ajustées et variées, et donc que je
trouve preneur pour mes belles grand cannes de gnôme. Si j’achète des jeans
dans une boutique ailleurs, le genou m’arrive sur le tibia, pis j’ai tellement
de lousse dans le bas mes pantalons que j’peux me faire une paire de shorts
avec, une fois le rebord fait. M’a dire comme on dit, j’habille pas vraiment sur
le rack.
Mais ce qui
me convainc surtout que je suis un gars ben ordinaire; j’vais toujours dans le
même rack de jeans, où y’a la seule coupe qui me fait bien, c’est-à-dire la
coupe « classique ». J’ai déjà essayé, une fois, de faire différent avec
une coupe « ajustée », un tantinet plus wild; en sortant de la cabine
pour me voir dans le miroir, ben criss j’ai turné off la vieille watcheuse, celle
qui débarre les cabines d’essayage avec son trousseau de clés après le poignet!
Donc pas le choix, coupe classique pour le monsieur. C’te coupe là me fait
tellement bien que dès fois j’me regarde pis j’me dis qu’ils ont surement un
moule de mon cul à l’usine, avec un sticker « ordinaire » dessus.