Hier je m’étais
booké un p’tit massage, question de me gâter de moi à moi, et de relaxer avant
le début des fêtes. Je m’étais dit que ça serait bien de décompresser un peu,
en cette période de l’année plutôt rock’n’roll. Voici mon expérience.
Tout d’abord,
pour le timing, on repassera. Une grosse crisse de neige molle tombait en
sortant du travail, avec comme résultat que ça me prend 1h30 d’autobus pas confortable
pour me rendre à la maison, avec la p’tite nausée gratuite qui s’en suit. Là j’finis
par arriver chez nous, me disant que j’ai le temps de prendre une douche avant
de repartir, et je vois-tu pas que les tracteurs sont en train de tasser la
neige pour le passage de la souffleuse sur ma rue. Oh stress. Parce que si je
pars pas avant que la souffleuse arrive, je pars pas « point », je
vais être bloqué dans mon Tempo à regarder mes lumières de noël pâlottes. Mais
finalement, la chance me sourit, la rue est déserte, et je peux donc partir, encore
un peu humide, bien stressé et mes Kamik au pied. J’arrive tout juste à temps,
après quelques dérapages contrôlés. J’entre donc chez la dame, on jase trente secondes
par politesse (les enfants vont biens?), elle me pose les questions d’usage (As-tu
mal quelque part? On y va plus thérapeutique ou détente?), et on débute.
- J’vous
laisse vous préparer, je reviens dans 5 minutes.
-Ok merci.
Je retire donc
mes bottes Kamik qui m’arrivent au genou, mon manteau, ma tuque, mon foulard,
ma veste, et le reste du linge que je trouve en dessous de tout ça, et je m’étends
sur la table sous la couverture, en tenu on-ne-peut-plus décontracte, et je me fous
la face dans le trou de beigne. Quelques instants après, je l’entends revenir.
-Faites pas le saut, j’ai un peu les mains
froides, je reviens tout juste du dentiste et j’arrive pas à me réchauffer,
désolée...
-ok (génial…)
Heee criss, je
fais le saut, mes orteils crochissent. Mais bon, ses mains se réchauffent assez
rapidement, et j’essais de me détendre tant bien que mal. Et c’est là que ça
part en vrille. Je crois que mon cerveau n’a jamais vraiment compris le sens du
mot « détente ». ..
« Bon
bon bon, faut que je relaxe. Respire mon homme, et apprécie le moment. C’est du
temps juste pour toi, tu le mérites. Change-toi les idées en attendant, tiens. À
quoi j’pourrais bien penser pour ça? C’est pas les choix qui manquent dans le
fond. Faut juste éviter de penser à ma blonde, avec ces mains qui se promènent
sur moi, j’voudrais pas finir par faire « le tipi ». Ah tiens, la
bière. Un sujet passionnant, et très matériel. Justement, faut que j’en achète pour le
réveillon du 24. Mais là j’amène quoi? Y’aura plein de monde, pas vraiment le
temps pour une dégustation… Et il faut de quoi d’assez générique, sans
arriver avec une caisse de Labatt 50 pis avoir l’air mononcle. Ouain j’sais
plus si c’est une bonne idée finalement. C’est plus compliqué que je pensais…
Hé misère!»
-Ça va? La pression
est correcte?
-Mmmouii (du
fond du trou de beigne).
« Bon, elle
est rendu en dessous des pieds. J’adore cette partie du massage, car après tout,
les pieds, on les sollicite tout le temps. Mais c’est le « après »
qui me gosse un peu, à cause de l’huile. Tsé l’été, tu dérapes dans tes
gougounes en te levant, c’est dangereux. Pis l’hiver, tu mets tes pieds chauds et
graissés dans tes bas de laine, pis tu rentre tout ça dans tes grosses bottes. C’est
un peu comme si tu t’étais mis le pied dans une marmotte… »
-Si jamais
il fait trop chaud dans la pièce, dis-le-moi, j’ajusterai.
-mmmokk…
« Woup
houp houp, me semble que sa main est allé un p’tit peu plus loin sur la fesse,
ce coup là, non?… Ça dû déraper à cause de l’huile j’imagine. C’est pas que c’est
désagréable, mais on frôle la limite de ma zone d’aisance en nudité publique,
là. D’ailleurs, je me demande si y’a des règlements stricts à ce niveau dans l’ordre
des massothérapeutes? Y’a surement quelque chose comme une « Zone de
dégagement minimale en bordure de la raie », en centimètres, ou quelque
chose du genre… »
-Si tu veux
te retourner et descendre un peu, on va faire la tête et les bras.
-mmouiiiii
J’me
retourne mal habillement sous la couverture qui me colle au cul, la face toute
engourdie d’avoir passé 30 minutes dans le trou de beigne, et j’me dis que j’dois
avoir une sale gueule.
-T’es pas
mal tendu, tu ne devrais pas attendre autant avant de revenir.
« Non
mais ça me stress toujours moi, un massage. J’ai peur de trop me détendre, et
de péter. J’veux pas non plus m’endormir, pis pas sentir que ça me fait du
bien. Tsé si tu te réveilles pis t’a rien senti… à quoi ça aurait servi? Pis c’est
dont énervant de pas savoir à quoi penser pour se changer les idées. C’est
comme dans une chaloupe à la pêche, sauf qu’au moins tu peux te concentrer sur
la ligne. Là faut comme performer créativement mais avec le cerveau qui baigne
dans l’huile, c’est pas évident …»
-J’ai
terminé…J’te laisse quelques minutes, et je reviens…
-hummppffhhh
Sur ce, je
me lève mollement, un peu étourdi, et enfile mon linge par-dessus mon corps bien
gras. Elle revient, on échange paiement et reçu avec nos mains huileuses, j’enfile
mes marmottes, et je sors. Je m’assois dans l’auto, le dos me crispe parce qu’il
fait -30, mes fesses rentrent par en dedans, les doigts gèlent bien dur sur le
volant glacial, et j’retourne à la maison, dérapant ici et là.